Les pistes cyclables du centre-ville de Chengdu ne nous lâcheront pas avant 150 km... musique dans les oreilles et roule ma poule. On a même parfois plus de place que sur les files d'autoroutes.
C'est Byzance pour les cyclistes ! Bien que Beijing soit au nord-est, nos premiers coups de pédale vont plein sud sur Leshan pour la curiosité du Bouddha sculpté assis le plus grand du monde. Cette fois, les temples bouddhistes et les alentours ont des airs chinois.
Comme les visiteurs sont petits ! Un simple pont sur la rivière Inde du nord ou Chine du sud, lamas et nonnes passent leur même temps à étudier l'égrainage du chapelet...
Nous roulons maintenant direction ouest, sur la route qui mène au Tibet. Arrêt pipi intéressant jamais vécu auparavant : deux trous côte à côte séparés d'un petit muret de 60cm de haut, pas de porte. Vous pouvez donc tailler la bavette et faire connaissance avec votre voisin. Pets et autres bruitages ne sont pas tabous et nous dirions même... se lâchent sans gêne ! A l'arrière, les excréments de deux beaux gros cochons roses glissent dans la même fosse que la nôtre. Deux journalistes arrivent fort heureusement juste après ce moment-là et photo et interview seront postés dans un petit journal local, le "Leshan ri bao she". Des adolescentes fières de leurs quelques mots d'anglais roulent un bout avec nous pour nous montrer la route.
Arrivée à Emei Shan, la montagne au sommet bouddhiste le plus sacré est un lieu de pèlerinage. C'est vaste, vert et luxuriant. On y monte et descend des escaliers durant quatre jours, malheureusement dans une brume épaisse qui ôte toute visibilité.
Les randonneurs jouent à nourrir les singes en liberté qui deviennent agressifs. Le bâton ne suffit plus à les chasser... Hein ? Christine !
Nonnes en pèlerinage Et quand on vous disait que les Chinois étaient organisés. Ici, si vous êtes fatigués, on vous donne un coup de main sur plusieurs km. Même dans les montagnes suisses, vous n'avez jamais vu ça !
Ni âgées, ni blessées Il faut dire qu'en général, les Chinoises grimpent en montagne en minijupe, sac à main et hauts talons ! Néanmoins dans la descente, un couple sourd-muet, la cinquantaine, nous suit, ils sont sportifs, pleins d'entrain et drôles. Puis, de retour à l'hôtel, nous rencontrons un couple de cyclotouristes chinois dans leur 4'000ème km en Chine. Il y a dans ce pays de la graine de cyclovacanciers, puisque dans les deux mois qui suivent, nous en croiserons une soixantaine, plus qu'en Italie ! Nous apprenons d'ailleurs que la seconde plus grande course après le "Tour de France" est en Chine (vrai ?)
Sur la route de Ya'an nous testons l'oeuf de cent ans, Chris le déguste, je ne réussis pas à l'avaler, puis cuisses de crapauds, tomates sucrées suivies d'une salade de fruit à la mayonnaise. Pour rectifier un peu toutes ces saveurs, on suce deux glaces... une aux petits-pois, l'autre au maïs !
Zut ! j'ai oublié (ou Christine ?) mon câble inox et cadenas dans l'hôtel de la veille, je fais demi-tour seul et ajoute 82 km bêtement au compteur... et le lendemain, nous roulons 18 km dans la fausse direction. Bravo, ces temps ont les accumule ! Mais l'arrivée à Ya'an est superbe.
Brochettes le long des quais, musique et bonne ambiance partout, juste un peu trop de spectateurs autour de notre table où deux jeunes ados se sont installées pour pratiquer leur anglais. A la table d'à côté tout un groupe chante et s'amuse en buvant la bière abondamment, ce sont des Tibétains visitant la Chine. Les gens sont adorables et attentionnés.
L'arrêt suivant dans l'hôtel d'une petite ville nous fait découvrir le dancing. On y boit une bière suivie par l'invitation de l'équipe médicale d'une clinique des yeux de Chengdu. Nous dansons comme des fous, c'est détendu et familial. L'équipe se dandine avec nous et deux jeunes filles nous expliquent la danse actuelle qu'elles maîtrisent.
La route est rude, pluvieuse et encombrée, mais on achète directement à l'apiculteur le meilleur miel qu'on n'ait jamais mangé, avec un savant goût de fleurs et d'épices, ça donne la pêche pour arriver à Luding, sympathique petite bourgade encaissée dans une vallée profonde avec pour histoire le plus glorieux évènement de la Longue Marche. Le 19 mai 1935, 20 soldats des troupes communistes traversent le pont, à bras par les chaînes, et gagnent les troupes du Guomindang.
On voit les premières femmes en vêtements tibétains et ce soir là, on découvre pour 3 euros l'heure les massages chinois qu'Eric ne manquera pas par la suite de renouveler un maximum. Il y a danse et gym comme chaque soir sur la place publique.
Kanding à 2500 m d'altitude, beaucoup de Tibétaines en robe longue, tresse de laine rouge et noire nouée autour de la tête ou chapeau genre "chic". Les architectures sont colorées.
10h du mat, ça monte bien pour sortir de la ville, ça monte encore après le virage, puis le deuxième mais ça va s'adoucir au troisième. Pas du tout, ça monte encore et plus que ça ! Il est midi et ça monte toujours, on a fait 12 km. La sueur coule dans le dos et les muscles sont tendus. Petit pique-nique léger car les camions que l'on croise semblent être en roue libre, alors la descente n'est pas derrière la prochaine courbe, peut-être la seconde ? Pas du tout ! 16h avec 24 km au compteur, et devant, le fond de la vallée se cache dans la brume des hauteurs. Il pleut de plus en plus. Nous aurions aimé passer le col non mentionné sur la carte mais ça n'en finit pas. On roule encore 4 km, on a froid. Un petit bout d'herbe et terrain plat éloigné de la route au bord d'un ruisseau, et à 17h on monte la tente en Chine pour la première fois, jamais très rassurés ! Eric n'est pas vraiment courageux. Nous sommes à 3'600m d'alt. Le lendemain, 7 km pour passer finalement ce col à 3'820m puis 43 km pour arriver sur le plateau de Tagong à 4'200m, où les lamas sont nombreux. On se trouve désormais dans un monde totalement tibétain. Cette région du Sichuan leur appartenant est appelée le Kham. Elle s'étend sur le tiers oriental du plateau tibétain. On n'a pas vu de paysages aussi beaux depuis longtemps, douces prairies verdoyantes et fleuries avec torrents scintillants.
Les pistes aussi reviennent avec leurs beaux côtés mais aussi les moins bons...
On achète un fromage au lait de yak en forme de spaghettis tressés conservé dans de l'eau vinaigrée. Arrivée au village de Tagong, difficile de trouver plus traditionnel, chevaux dans les rues, vêtements typiques et beau temple sur place publique. Les nomades "khampa" viennent charger de ravitaillement leurs chevaux et retournent en famille à leur campement proche de leurs yaks.
Mais les khampas modernes sont motorisés
On fait une petite rando dans les sapins, pardon, dans les drapeaux à prières
Beaucoup de prières mais pas de cimetière depuis plusieurs jours ! Où sont donc les morts ? Eh bien, ils se sont envolés conformément à la tradition bouddhique tibétaine !
L'enterrement céleste
Un religieux (tomden) aiguise son grand couteau. En récitant des mantras, il enfonce sa lame dans le corps mort qu'il découpe en morceaux sur une dalle de pierre extérieure. Il broie ensuite les os et le cerveau qu'il mélange à la farine d'orge. Dès que ce maître de cérémonie s'éloigne, les vautours qui tournoient fondent sur le cadeau et le corps disparaît envolé.
Les Chinois communistes (en opposition avec l'église) interdirent cet acte considéré barbare dans les années 60/70, mais critiqués, ils redonnent ce droit aux Tibétains en 80 qui pratiquent aujourd'hui ce rituel écologique. Ok, le sol est souvent gelé et le bois bien rare.
C'est beau les traditions, ça donne des frissons, fait de belles photos et beaux souvenirs d'aventure en cartes postales. Mais nous ne sommes pas allés voir.
Où doit donc commencer la modernisation ?
Vieux lamas avec un élève, pardon un boy à tout faire... A midi, pattes de poule mais pas la cuisse bien rôtie comme chez nous, seulement les doigts et ongles avec la peau et les os. On n'a pas compris ce qu'il fallait manger ? Pourtant les Chinois en sont friands !
Heureusement un deuxième plat : jolis petits morceaux de viandes dorés tous identiques... Ce sont des dizaines de langues de canard, cartilage et peau rugueuse.
Nous continuons avec la faim direction plein-nord, les vallées se succèdent, verdoyantes, désertiques ou boisées comme notre Jura. La population semble bien pauvre mais les maisons sont immenses, belles et colorées.
Structure en troncs d'arbres entiers Durant deux semaines, les cols se suivent entre 4'000 et 5'000 m d'alt. avec à l'arrière-plan des sommets jusqu'à 7000m. Nous avons beaucoup roulé et cependant, une seule crevaison avec les pneus Schwalbe, société allemande qui a décidé récemment de nous sponsoriser en offrant pneus et chambres à air. Notre moyenne de crevaison est de 1 pour 3000 km par vélo alors que nous roulons avec pneus petits diamètre (HS308) et bien souvent sur de mauvaises routes.
Juste après une bagarre avec deux gros chiens bien méchants, nous croisons un lama français sympa qui nous propose l'hospitalité du logement et repas dans sa guesthouse proche du temple de Dzogchen, malgré son absence. En quittant, nous laissons tout de même un peu d'argent que le lama associé local trouve insuffisant... car les Occidentaux sont riches, dit-il ! Fait divers qui casse un peu l'invitation spontanée !
Il est pourtant bien sympathique, il veut m'aider à cuisiner et me propose de partir avec une femme locale !
Nous vivons par hasard dans ce village une fête champêtre traditionnelle tout à fait intéressante. Une tente pour la puja (prière bouddhique), une tente pour faire le thé dans le chaudron du druide "Panoramix", des kiosques casse-croûtes, danses religieuses, chevaux et autres activités. C'est un grand moment de rencontre entre habitants descendus des montagnes, et pour nous un joli condensé du monde tibétain de la région du Kham.
Deux lamas passionnés par les danses religieuses Lama Eric, mais juste le look ! La route continue toujours au-dessus des 4'000m. Pratiquement chaque village construit son nouveau temple avec dorures à la feuille d'or. Les lamas roulent en 4x4 Land Cruiser neufs, intérieur cuir et musique moderne. L'un d'eux porte des lunettes de soleil avec un coeur de faux diamants incrustés sur le verre. Ils viennent surveiller les travaux et donner les ordres aux ouvriers chinois et artistes venant de Lhassa, statuaires des dieux. L'argent des associations occidentales pour le Tibet libre arrive tout seul, il faut bien l'utiliser ! et pourquoi le remettre au peuple ? puisque par ordre de valeur numérotée par eux-mêmes avec en tête le dalaï-lama, ensuite ses sous-fifres et en queue... le peuple admiratif et adorateur du seigneur.
Dans le petit salon de la guesthouse, attitudes douteuses d'un lama mettant la main dans la raie des fesses de son tout jeune disciple (env. 12 ans) pour "l'aider" à se lever, sans aucune réaction du jeune homme qui semble habitué. Cette attitude sans équivoque nous choque. Les autres lamas sont assis dans l'herbe, fiers devant leur belle voiture, oisifs toute la journée. Il nous reste le Tibet à traverser avant de nous faire une opinion plus précise. Nous irons voir au printemps prochain.
On a du Nescafé collé partout ! Avec l'altitude, le couvercle du pot a explosé.
Anecdotes bivouac
La route n'est pas facile, avec chaque jour un col et il pleut pratiquement tous les soirs mais les anecdotes réchauffent et alimentent le voyage !
A 7h du matin sous la tente, arrive une nomade avec une bouteille plastique d'un demi-litre de lait frais de yak, elle observe notre matériel. Sur le départ, on va leur faire nos adieux derrière la colline et restons une heure sous leur tente tissée en laine de yak. Assis sur un lit à coté de la mobylette et sous le lard pendu qui sèche, on boit ensemble le thé salé beurré, sous le regard fixe des deux vieux. Un grand récipient en bois avec yaourt frais fait le bonheur de l'enfant qui y trempe sa main et sa manche de veste avant de s'en crépir la bouche, le nez et le front. Il fait déjà inconsciemment ce que tous les travailleurs extérieurs font pour se protéger du soleil : du yaourt le matin sur le visage qui sèche, graisse et protège toute la journée (c'est vrai ! pourquoi Christine choisit-elle toujours les crèmes de chez Dior ?)
Elles se protègent aussi du soleil avec des masques En surplomb d'un lac, deux pêcheurs chinois nous repèrent et viennent "discuter". Ils nous mettent en garde contre les nombreux loups. Nous les entendrons la nuit, disent-ils mais ne bougez pas, vous ne risquez rien. C'est vrai, nous en avions aperçu trois le matin même, s'éloignant en courant, ainsi qu'un jeune yak éventré, observé de près par un garçonnet étonné. Puis, les deux pêcheurs disparaissent puis réapparaissent une heure après avec deux petits brochets mijotés dans des tomates épicées, et thermos de thé chaud. Comment ont-ils deviné que nous n'avions qu'une saucisse, des nouilles chinoises et pas trop envie de cuisiner dans les bourrasques ?
Après une longue journée de pluie et froid et un col à 4800 m, une équipe de 14 hommes de réfection des routes nous proposent de camper vers eux. Christine accepte, contente et rassurée à la vue du premier petit bonnet blanc musulman en Chine, malgré le terrain bien boueux pour piquer la tente. Cuisiniers à tour de rôle, ils partagent avec nous leur popote, assis autour du four en terre sous la pénombre de leur tente. La communication est difficile mais la chaleur de leur hospitalité et leur amabilité nous en ont dit plus que bien des paroles.
Et la route continue
Ce sont les vacances aussi en Chine ! Le team cyclistes de Wuhan nous offre leur tee-shirt signé par chacun. Nous croisons un seul couple de cyclotouristes occidentaux qui, baissant la tête dans la descente, nous voient trop tard et ne s'arrêtent pas, nous sommes tout déçus !
Anecdotes de la route
Ma pompe tombe dans les rayons de ma roue arrière, je plante les freins mais mon vélo fait un bon en avant ! Forcément, c'est Christine à l'arrière qui n'a pas eu le temps de freiner et qui, tentant de m'éviter, mais trop large (le vélo, pas elle !), me heurte avec sa sacoche avant . Elle chute et laisse peau et sang de son coude sur le bitume. Seul son déflecteur est cassé sur son vélo, mais réparable.
Eric sous la pluie Village chinois de Xiewu à 3700 m d'altitude 1er août, fête nationale suisse, Christine est à l'honneur. Chris gesticule et danse sur la route, folie ? Les trois abeilles qui dansaient avec elle ont appelé leurs copines, en très peu de temps, la salle affiche complet, des centaines d'abeilles lui font la fête ! Avec mon aide, Chris enfonce le chapeau, enfile un pull manches longues avec panique. Sa danse s'accélère et l'on fonce dans la seule maison proche. Notre arrivée à tombeau ouvert dans la cour effraie ses locataires qui comprennent vite. On court à l'intérieur où je m'active à arracher abeilles et dards, deux piqûres dans le cou, deux dans l'oreille droite et cinq sur le crâne. J'en gagne une au bout du pouce et une dans l'avant bras. Notre médecin Remy Peysson n'est pas avec nous ! Que faire ? On se protège au mieux avec chapeau-moustiquaire, gants, manches longues et l'on roule accompagné par un habitant jusqu'à l'hôpital local à une dizaine de km, avec une bonne montée... Christine a mal à sa tête déformée. A notre gauche apparaît un village en pisé, rues en terre, c'est là ! L'hôpital n'est qu'une pharmacie et l'on réveille son vendeur-gérant ébouriffé en pleine sieste qui s'intéresse plus aux exceptionnels étrangers du village qu'à leurs piqûres... Il nous sort enfin une fiole au liquide vert et une pommade miracle, face à une trentaine d'observateurs villageois hébétés.
Heureusement, une tête difforme n'a jamais empêché un cycliste de rouler :-) trois jours plus tard Christine va bien.
Xining, puis Lanzhou et Zhongwei, dans une suite de belles descentes qui nous ramènent à 1500 m d'alt. Nous commençons à sentir le désert toujours plus proche avec la chaleur, la poussière, les vents du soir, le sable et la sécheresse. Les paysans de la région sèment 20 cm de cailloux sur le sable, ce qui le fixe et garde en-dessous le peu d'humidité, façon efficace de cultiver melons et pastèques en quantités.
Nous avons quitté le monde tibétain, sans avoir tout dit. Deux mois à traverser les régions du Kham et de l'Amdo ne sont pas sans chambouler nos vieilles idées reçues occidentales. En bref, comment les pratiquants bouddhistes aux pensées plus philosophiques que religieuses nous ont-ils tant déçus ?
Bouddhistes tibétains du Kham et de L'Amdo, constatations en vracs
Les Chinois créent des écoles mais les Tibétains y envoient encore bien peu leurs enfants (%?). Ils nous disent "ça ne sert à rien, envoyez-les durant 6 ans et ils ne sauront toujours pas lire !" Est-ce une manière de les faire travailler aux champs ? En attendant, le niveau est bien bas, mais ne profite t'il pas à l'état féodal du Tibet, au chef spirituel et souverain, le dalaï-lama qui vit en Inde à McLeod Gang dans un petit château en attendant de réintégrer le grand de Lhassa.
L'argent arrive en vrac entre autres des associations occidentales. Les lamas en profitent et les nouveaux temples fleurissent, toitures de feuilles d'or, peintures somptueuses et bouddhas en nombre.
Les lamas sont bien pansus en mangeant des bonbons et gâteaux toute la journée assis proche de leur grosse voiture, buvant les canettes de coca pendant que les Tibétains boivent l'eau chaude et mangent le riz.
L'Occidental qui reconnaît que dieu est mort depuis longtemps, croit financer l'aide au Tibet libre, mais à nos questions, le peuple de cette région semble ne pas toucher grand chose pour ne pas dire rien du tout. Ici, il finance en finalité le développement des édifices religieux et, par-là même, il accentue la puissance de ses représentants.
Nous ne comprenons pas, qui, après 57 ans, souhaite vraiment un Tibet libre :
- Le roi dalaï-lama vivant dans ses petits et moyens châteaux, et remerciant les Chinois du dévelopement qu'ils apportent ?
- Les lamas, qui vivent trop bien comme ça ? Confort financier, grosses voitures et petits boys servants (l'un d'eux avec son oeil bleu nous a fait penser à la pédophilie dans les églises ! Eh oui, on en a bien eu chez les catholiques, pourquoi n'y en aurait-il pas chez les bouddhistes ?)
- Les réfugies tibétains aux USA ou en Suisse organisant les associations et envois des dollars ? quel pourcentage d'entres eux reviendraient vivre vers les yaks dans les glaces durant 6 mois ?
- Les jeunes qui regardent la TV branchée sur parabole ? Ils en ont assez de cette vie traditionnelle. Ils commencent à imiter la jeunesse chinoise, créent des cybercafés et des dancings pour se dandiner avec les filles. Une nonne tibétaine à Dzogchen gompa nous dit : "J'ai quitté Lhassa, entre autres écoeurée par la jeunesse tibétaine qui tend à ressembler aux Chinois".
Et les pauvres familles qui vivent dans la bouse de yak n'ont rien à dire. Ils ne peuvent que s'écraser devant le chef et donner naïvement leurs quelques économies à la lamaserie du coin où ils ont mis pour l'honneur leur plus jeune garçon (ou fille) qui, choisi(e), n'osera ni se plaindre, ni en sortir.
Nous sommes déçu de n'avoir pas reconnu le Tibet (de l'est) tel que les versions idéalisées d'Occident nous l'avais enseigné.
A 23h, lumière éteinte, un lama pousse d'un coup sans frapper notre porte de chambre sans serrure pour nous observer sans gêne et sans respect (ce n'est pas la première fois). Christine est couchée mais je bricolais justement accroupi derrière la porte. Je la referme du même coup, ce qui lui coince la tête dans le chambranle. Même pas gêné, il sourit bêtement, je gueule. Son envie de voir est trop forte ! En partant, il colle de l'extérieur son visage à notre fenêtre et face à face, moi aussi collé au carreau gras, je lui fais une grimace de démon.
Je crois avoir vu le même démon dans nos églises. Celui-là a bien voyagé, le tourisme ne date donc pas d'aujourd'hui !
Nous ne sommes pas convaincus à ce jour qu'un minimum d'hygiène, de scolarité et d'attitudes responsables nuisent vraiment aux traditions d'un peuple.
On nous avait dit que Bouddha cherchait à tendre à la perfection !!! Et s'il se réveillait ?
Petite pause
Arrivée au bord du désert de Gobi dans le village de Shapotou proche de Zhongwei. Ce village, le long du Fleuve Jaune ressemble à un site d'attractions avec luge sur les dunes. Nous restons quelques jours pour écrire un peu et s'organiser pour les km à venir dans le désert. Les anciennes roues à eaux qui alimentent les vergers, et les radeaux traditionnels flottant grâce aux peaux de bêtes, sont restaurés.
On décide de visiter la ville proche de Zhongwei pour trouver Internet, c'est déjà l'anniversaire de mon fils et quelques uns de nos 9000 lecteurs mensuels nous ont probablement écrit. Sur le trottoir, un groupe de jeunes portent des tee-shirts blancs avec logo français "Les Foulées de la Soie", puis plus loin un couple d'occidentaux avec le même vêtement. Ils sont français participants d'une course à pieds étalée sur 15 jours, l'étape du jour étant au travers la ville dans l'après-midi. L'organisation SDPO avec la devise "Si courir était le seul but, nous passerions à côté de moments inoubliables" en est à sa 12ème édition. Jean-Claude, président organisateur nous remet des tee-shirts, Fabrice, directeur de course nous fait bosser à la circulation et Christian, participant humoristique et ventriloque adorable nous fait bien rire, notamment en passant la ligne d'arrivée main dans la main avec une jeune Chinoise. Nous remettons le présent aux plus rapides coureurs sur le podium et Fabrice nous invite au repas du soir. C'est un beau moment pour nous. Photos, journal, infos et inscriptions sont sur leur site : www.sdpo.com
Nous avons trouvé une petite route, dans le désert de Gobi, qui devrait nous amener à Hohhot à 900 km, depuis où nous rejoindrons la Mongolie.
Bonnes vacances à tous si ce n'est déjà fait.
Christine et un copain