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Dans une famille le jour de la fête "aïd el kebir"
Dans une famille le jour de la fête "aïd el kebir"

Et ce ne sont que des exemples ..
Dans quelques temps, nous allons quitter la Libye et vous raconter notre histoire, mais pour mieux comprendre ce que nous avons vécu, nous devons avant tout vous parler de l’hospitalité libyenne. Pourquoi ? et bien tout simplement parce qu’elle est incroyable et difficile à croire. A part les enfants, nous ne voyons pas de bicyclettes en Libye et sommes conscients de leur étonnement et admiration. Nous sommes aussi conscients de l’entraide naturelle qui s’installe lorsqu’une voiture nous croise en plein désert à 300 km du premier village, lorsqu’ils nous voient transpirer et souffrir face à un vent contraire, ils voudraient tout faire pour nous aider. Nous sommes conscients également du respect familial libyens, et puis Christine est une femme et cette femme pédale, et cette femme a aussi de grosses sacoches très lourdes, difficiles à traîner. Un dernier élément : nous sommes des touristes et les Libyens, fiers de leur pays, se mettraient en quatre pour que notre voyage se passe sans encombres. Ne soyez donc pas surpris si vous voyagez un jour en Libye dans des conditions différentes, de rencontrer une hospitalité différente. Néanmoins, ici l’hospitalité est partout, même dans les villes, et dans toutes classes sociales, du fermier au ministre du gouvernement. Maintenant que vous avez compris, nous pourrions éviter les exemples et anecdotes, mais nous ne résistons pas à vous en citer quelques-uns en guise de remerciement :
- Toutes les conditions sont donc requises pour que les camions qui nous doublent s’arrêtent, ouvrent leurs portes et nous disent de charger les vélos; mais quelle incompréhension face à notre refus difficile à expliquer en arabe.
- Les voitures s’arrêtent, nous discutons cinq minutes, ils nous prennent en photo, puis ils nous offrent ce qu’ils peuvent.
- Un jour, après notre pic nique proche de la route déserte, je dis à Christine : "il ne manque que le café". Et une voiture s’arrête avec deux cafés fumant à la main. Ils nous avaient vu passer quelques minutes plus tôt.
- Proches d’un village, après trois jours de route déserte et trois nuits de bivouac sauvage, une voiture s’arrête, deux hommes nous conduisent naturellement chez eux, nous mangeons puis prenons une douche et continuons notre chemin.
- Nous n’aimons pas beaucoup parler d’argent mais sachez que sans efforts du tout, ni restrictions, nous avons dépensé 30 € par personne pour parcourir 1'860 km en trois semaines, repas et logement compris. Tout simplement parce qu’on nous donne, nous donne et nous donne. Cela va de l’eau au pain en passant par les biscuits, chocolats, légumes, fruits, yogourts, etc.
- Nous arrivons à Ghadamès, ville touristique appelée perle du désert. On nous invite et l’on nous installe dans un studio libre, le temps nécessaire pour trouver la rare voiture qui nous permettra de traverser le désert. Nous attendrons 13 jours. Nous nous installons et préparons un bon repas; trop vite, car un serveur arrive avec un immense plateau avec entrée, plat et dessert. Les repas seront offerts durant tout le séjour, midi et soir.
- Nous posons une question dans un restaurant luxueux. C’est l’heure du repas, alors nous sommes simplement invités.
- A un policier qui veut absolument nous rendre service, je demande un petit morceau de beurre pour continuer agréablement mon petit-déjeuner. Il revient avec une boite de 100 petites plaquettes individuelles de 10g, soit 1kg de beurre, et il ajoute un bidon de 2 litres d’huile pour notre cuisine.
- Un fermier s’arrête pour nous offrir quelques fruits, quelques légumes. Nous discutons un moment, avec les mains bien sûr. Il est impressionné par notre histoire et remonte dans sa voiture avec de grands adieux. Il fait 100m et recule jusqu’à nous. Je m’approche et le vois sortir plusieurs billets de banque de sa poche. Il veut me les donner. Je refuse. Une bagarre s’installe mais je n’ai d’autre solution que d’en accepter un. On se sent mal, avec un peu de honte. Pourvu qu’il ne vienne jamais en Europe.
- Un jour, nous roulions depuis deux heures sans avoir vu personne. On croise une voiture qui s’arrête, un adolescent descend et s’approche avec deux sacs pleins de bonnes choses. Nous avions discuté ensemble la veille. En même temps, une voiture vient de l’arrière et s’arrête. J’imagine un guet append. Un homme vient à moi et me dit avec interrogation et fort accent libyen : "Eric ?". Imaginez la surprise. Et bien, cet homme habitait à Tripoli à 1300 km et nous connaissait par intermédiaire. Comment remercier une voiture et discuter avec une autre ? Ils nous hissent au rang de héros, il faut dire que nous n’avons encore croisé aucun cycliste.
- Cinquante kilomètres avant d’arriver dans une ville commençait la distribution des numéros de téléphone. Tous ces gens voulaient nous loger. Il nous suffisait de les appeler et tout s’organisait.

Ces quelques histoires sont vraiment des exemples au hasard. Cette hospitalité se manifestait plusieurs fois par jour au point d’en organiser nos sacoches chaque matin de manière à avoir de la place, accepter leurs cadeaux et ne pas les décevoir. Tellement de fois par jours, qu’il nous arrivait de s’arrêter chaque kilomètre et progresser au ralenti. Tous ces gens sont fiers d’avoir gardé la mentalité des vieux du pays (ceci, selon une discussion avec deux pêcheurs). Chacun a su garder en lui une part du Targui, homme du désert, et de l’entraide qui les unit.
Et dire que certains d’entre vous se sont faits du souci pour nous !