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Maud vient nous voir à Chypre
Maud vient nous voir à Chypre

Nous débarquons à Chypre le 18 juin après-midi et fonçons à l'intérieur des terres, droit devant. Nous traversons le mur des lignes ennemies à Lefkosia pour arriver à l'heure à Larnaka. Mes termes sont militaires mais à l'heure de l'Europe, des fusions ou des réunifications, cette petite île est aujourd'hui encore coupée en deux par un mur existant depuis 1974, soit 31 ans. On en reparlera.
L'objectif de notre avancée si rapide : c'est un nouveau rayon de soleil à portée de main, ma fille Maud vient passer des vacances avec nous. Elle restera près de trois semaines. Ce sera donc aussi notre break, nos vacances. Ensuite, un couple d'amis nous rendra visite une dizaine de jours. Ils prolongeront encore nos vacances, avec vélos au repos, bronzette, baignades et balades... à pied. Puis à nouveau seuls, nous décidons de stopper encore. Il fait 43 degrés à l'ombre. Le pays est montagneux. C'est vraiment trop chaud ! trop dur de rouler ! et puis nous cherchions la lenteur ? et bien nous l'avons trouvée ! Certains d'entre vous se sont inquiétés de notre silence, vous n'auriez pas dû et nous en sommes désolés ! Résultat, nous quittons Chypres le 8 octobre avec seulement 1'078 km parcourus.

Le détail
Le 18 juin, nous avons d'abord traversé Chypre nord, trop vite pour avoir un avis, mais nous y reviendrons pour retourner en Turquie et visiterons à ce moment-là. Nous accueillons donc ma fille à l'aéroport à Chypre sud. C'est l'Europe ! Les mêmes buildings, mêmes magasins, mêmes marques qu'à Paris, mêmes baskets alignées aux étalages, même mode chez les jeunes, etc. L'effet est bizarre, c'est une sorte de retour à la maison, alors que nous avons roulé 10'120 km, un quart de la circonférence du globe... une sorte de déception, mais aussi une sorte de repos. Nous trouverons les magasins spécialisés vélo, vêtements et en profiterons pour une remise en état ou simplement améliorer des petits détails techniques et pratiques. Par exemples, nos grosses gourdes de 2 litres efficaces en Libye ne sont pas pratiques en montagne pour boire tous les 300 mètres, etc.
Et mes deux femmes se relaxent.

Les filles... c'est parfois bien bête !
Les filles... c'est parfois bien bête !

De vrais phoques !
De vrais phoques !

L'anecdote de notre première nuit, néanmoins symptomatique !
Les deux campings sur la carte sont fermés au profit de constructions touristiques et aucun logement à l'horizon. Un restaurateur nous dit de camper derrière une petite église orthodoxe, église Agia Tekla sur le haut d'une petite falaise, vue sur la mer. Le site est très beau, le Seigneur nous protège !
Réveil en catastrophe à 6h. du matin. Christine, qui dormait à l'extérieur de la tente pour profiter de la vue sur la mer et de l'air frais, se fait chasser par un pope (prêtre), qui la menace avec sa canne en faisant geste de la frapper et, de son autre main, secoue activement la tente où dormaient paisiblement Eric et Maud. On est franchement choqué par une attitude pareille. Ce sage vieillard marmonne des paroles incompréhensibles pour nous, mais nous retenons juste le mot "turcs". On comprend par là l'animosité qui persiste. Il est agressif et sans politesse, il nous râle de déguerpir ! Il était pourtant bien beau avec sa robe noire, son haut chapeau et son gris chignon. Nous plions bagages et cette fois réveillé, Eric vexé va expliquer au pope comment fût exemplaire l'hospitalité des turcs et des pays musulmans durant une année de voyage, qu'il pensait que l'hospitalité chrétienne était un des principes de cette religion, et qu il se ferait plaisir à raconter ce fait divers sur un site Internet. Le pope Giorgos s'excusa, nous donna un pain et après un salut Marie et un signe de croix, se purgea d'un coup de tout pêché !
Les popes ont du pouvoir et le montrent sans gêne, d'ailleurs le président Makarios, au pouvoir jusqu'en 1974, était pope.

Nous commençons donc par visiter la côte sud de l'île, Christine et moi à vélo retrouvons Maud à Governor's beach. Maud, sans vélo, voyage... en bus !

Roches blanches et sable noir
Roches blanches et sable noir

Nous faisons pas mal d'heures de plage, jeux de cartes, bisous, blablatage et mises à jours, mais quel repos !

Comme en  1970 ...
Comme en 1970 ...

La presqu'île d'Akamas toute proche est une réserve naturelle oû les tortues viennent pondre leurs oeufs sur les plages sauvages.

Saturés de plage, nous grimpons dans les montagnes intérieures de Troodos. Il fait très très chaud, 43 degrés à l'ombre. On est rouge, on va éclater (pas les pneus) dans les 100 km de montée. On décide de rester au sommet à 1'800 m et repartir raisonnablement dès que la température sera supportable, et ce sera fin septembre. C'est évident, on aime la montagne même si elle est dure à grimper, l'air y est frais, ça sent le pin, on cuisine au feu de bois et on y dort bien.

Sur le sentier du "tour de Troodos"
Sur le sentier du "tour de Troodos"

ça sent bon ?
ça sent bon ?

Mêmes les petits oiseaux s'intègrent à notre campement et pour cause, ils vident nos poubelles la nuit et nous volent nos tranches de pain au petit-déjeuner, mais ils sont si jolis !

Un p'tit malin !
Un p'tit malin !

Si les oiseaux sont beaux, Christine ne devient-elle pas peu à peu le Cro-Magnon de notre préhistoire ?

Va-t'elle gagner le feu ?
Va-t'elle gagner le feu ?

Christine va-t'elle un jour remettre de petites chaussures à talons ?!
Christine va-t'elle un jour remettre de petites chaussures à talons ?!

Avant le départ de Maud, nous descendons visiter Lefkosia, la capitale. Nous retrouvons des amis chaleureux qui nous préparent un repas totalement chypriote. Merci encore.

Une invitation chypriote
Une invitation chypriote

Lefkosia est très moderne et ses rues piétonnes sont charmantes, mais nous ne verrons que la moitié sud parlant grec, puisque cette ville est coupée en deux par un mur militaire depuis 1974. Le mur de Berlin est tombé, pas celui-là ! et au travers du mur, on entend le muzzin qui appel à la prière.
Quelques photos interdites prises... en douce !

C'est aussi le thème de certaines oeuvres d'art telle que ci-dessous montrant une femme cachée et apeurée.

Petite info sur ce mur militaire :
En 1925 Chypre devient une colonie de la Grande-Bretagne, frustrant les chypriotes par le manque d'autodétermination. Il s'ensuit un premier mouvement en faveur d'une union avec la Grèce, mais la population chypriote parlant turque (18%) s'y oppose, ce qui mène à des émeutes intercommunales. Dans les années 40, l'église orthodoxe chypriote se positionne ouvertement en faveur de l'union grecque. En 1954, la Grande-Bretagne prépare une nouvelle constitution pour Chypre, acceptée par la population turque, mais refusée par les extrémistes de l'EOKA, qui installent une guérilla contre l'administration britannique. En 1960, la Grande-Bretagne donne l'indépendance à Chypre en installant l'archevêque Makarios comme président et le turc Fasal Kükük comme vice-président. En 1963, Makarios propose certains amendements qui donneraient du pouvoir aux grecs. Le gouvernement turc les rejette et menace d'intervenir militairement, mais s'abstient sous la pression de l'URSS, de la Grande-Bretagne et des Etats-Unis. Des violences intercommunales s'en suivent. En 1967 une junte militaire prend le pouvoir en Grèce. La demande d'une union cesse, car personne ne veut collaborer avec un pays au régime répressif. Néanmoins, le 15 juillet 1974, la Grèce monte un coup d'état pour renverser Makarios et imposer l'union à Chypre. Makarios doit fuire le pays, échappant à une tentative d'assassinat. La junte installe au pouvoir le leader de l'ex-guérilla, Nicos Samson. Evidemment, les turcs réagissent en envahissant l'île. La junte, réalisant l'erreur commise, désinstalle immédiatement Samson, sans toutefois empêcher les troupes turques de continuer leur avancée, occupant le tiers nord de l'île. En 1983, le turc Rauf Denktash déclare Chypre nord une république indépendante avec lui-même comme président. Seule la Turquie reconnaît la nouvelle nation. Depuis lors, se tiennent des conférences de paix, sans toutefois trouver une solution au problème chypriote.

Suite de notre parcours
Nous campons 3 nuits à Lefkosia dans la cour de la maison ancienne de Caterina et de son mari Stefanos, artiste bien connu. Ses peintures, superbes, sont peintes sur canevas permettant à une lumière placée à l'arrière de faire apparaître une seconde peinture par transparence, soit deux tableaux en un, le jour et la nuit, deux réalités de la vie.

Quelle surprise !
Maud nous quitte déjà et nous retournons dans la fraîcheur de nos montagnes. Nous sommes seuls au camping, assis au p'tit café... et qu'arrive-t'il ? on n'en croit pas nos yeux ! un couple d'amis présents à notre départ de France, surgit sur la terrasse ! Florence et Alain, pseudos Rocky et Tina Turner, avec qui nous passerons de bons moments ensemble durant 10 jours.

Tout le monde repart chez soi et nous restons si longtemps à Chypre que je décide de travailler un peu, ça aidera mes finances (n'hésitez pas à me demander mon compte bancaire !) et me fera entrer dans la vie chypriote. Je deviens barman 3 soirs (nuits) consécutifs par semaine, dans le meilleur bar de Lefkosia. Musique live et ambiance d'enfer ! les barmans boivent plus que les clients qui attendent gentiment d'être servis ou mieux, las d'attendre, passent derrière le bar et se servent eux-mêmes.

Et le boss tout en muscles nous invite chez lui.

Je descends donc en ville 3 jours par semaine où je serai logé par une équipe de sénégalais qui tiennent la boutique africaine "Tam Tam".

Avec Alex au téléphone
Avec Alex au téléphone

A mon premier retour à la montagne où Christine m'attend... sagement, je la retrouve serveuse au p'tit restau du camping. Ses patrons âgés sont traditionnels et tout de noir vêtus. Le soir, ils mangent ensemble sans dire un mot, devant la série télévisée... en grec. Heureusement, elle rencontre de chouettes voyageurs.

Nous faisons la journée de belles randos dans la montagne.

Avec le pas décidé !
Avec le pas décidé !

La température baisse enfin à 35 degrés, nous équipons les vélos et passons le mur pour Chypre nord parlant turc. Lefkosia nord est totalement différent du sud. Ambiance traditionnelle turque avec des familles d'Anatolie centrale venues s'installer dans les anciennes maisons. Par ailleurs, beaucoup d'activités de rénovation de qualité, d'améliorations diverses et d'accueil des visiteurs. On y trouve de magnifiques édifices gothiques et ottomans.

Un caravansérail servait à loger les commerçants et voyageurs
Un caravansérail servait à loger les commerçants et voyageurs

Et dans les ruelles, de nombreux artisans très chaleureux.

Un pâtissier pour loukoum
Un pâtissier pour loukoum

Puis on fera 400 km dans la péninsule de Karpaz pour goûter aux plaisirs sauvages d'une si belle île.

Entre Balalan et Yedikonuk
Entre Balalan et Yedikonuk

On y trouve des ânes sauvages curieux et timides à la fois.

De magnifiques plages où les tortues y pondent leurs oeufs sont protégées par des mouvements associatifs.

Des bords de mer avec dunes de sables ou, mieux encore, une géologie étonnante (sable cimenté ? navrés, nous ne sommes pas géologues).

Nous avons passé de bonnes vacances à Chypre avec le regret toutefois d'avoir consacré trop de temps au sud moderne et pas suffisamment de temps dans les espaces sauvages du nord.
Nous quittons Chypre en bateau le 7 octobre pour entrer en Turquie.
Notre circuit ci-dessous à Chypre.

En forme de huit, 1'078 km
En forme de huit, 1'078 km