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Le retour des pêcheurs
Le retour des pêcheurs

La deuxième partie de notre séjour à Oman a duré plus longtemps que prévu, un mois et demi, avec beaucoup d'imprévus. On nous propose de tourner un film publicitaire sur le trekking à Oman. On passera donc 2 semaines sans nos vélos, à vadrouiller dans le pays devant une caméra. Oman est une merveille, un vrai régal.

Wadi Shab, petit coin de fraîcheur
Wadi Shab, petit coin de fraîcheur

Une invitation sur la montagne Hajar
Une invitation sur la montagne Hajar

La traditionnelle bienvenue
La traditionnelle réception de bienvenue se passe sur un tapis, sous un arbre, au centre du village. Il est d'usage de se déchausser, puis de serrer la main aux hommes debout et alignés, sans oublier toutes les formules de présentation, et l'on s'assied en rond sur le tapis. Au centre du groupe est posée la théière, le pot de dattes et une jatte pleine d'eau dans laquelle on a rassemblé les 4 petites tasses en porcelaine du village. Le plus âgé reçoit le thé le premier, puis les trois suivants. Les autres attendent gentiment plus ou moins longtemps, car rendre sa tasse vide sans tremblement volontaire de la main signifie qu'il souhaite encore un thé. Le tremblement énergique attendu, l'on rince plusieurs fois la tasse dans la jatte pleine d'eau et l'on propose cette tasse au suivant. Ici, on ne met pas la datte dans la bouche pour cracher le noyau. Vous devez presser fortement la datte entre le pouce et l'index de la main droite pour en extraire le noyau et vous mangez enfin la chair restée collée au bout du pouce; tout ceci, jambes croisées et le plus relax possible. Faites la même cérémonie à rebours pour votre départ (salutations, chaussures..) et revenez dans 2 ans, ils n'auront pas oublié votre nom.

Bédouines sur la montagne Hajar
Bédouines sur la montagne Hajar

Quelques jours plus tard, on nous présente le film de 25 mn et l'affiche du film.

Christine à l'affiche
Christine à l'affiche

Christine gonflée à bloc enfourche son vélo pour 19 jours. Je la suis. Il fait autour des 40 degrés. Nous partons à 5h du matin et campons proche de Qurayyat à 100 km. Le lendemain, départ encore plus tôt. La route se transforme en piste difficile, avec des montées abruptes et de la caillasse, 50 km qui nous épuiserons. Christine casse la semelle de ses sandales toutes neuves qui n'auront duré qu'une journée. Ce sont ses seules chaussures. Je les répare avec un gros scotch et Inch Allah, la prochaine ville est à 200 km. Finalement, Christine trouvera une paire de nu-pieds de secours dans un petit village. Il fait encore très chaud. Nous consommons 16 litres d'eau et cherchons l'ombre. De rares arbres nous sauvent. Ce sont des arbres à encens. 5 000 ans avant J.-C., le sud d'Oman était déjà le centre du commerce de l'encens troqué en Inde contre les épices.

Sieste entre Qurayyat et Dibab
Sieste entre Qurayyat et Dibab

Arbre dont on tire la résine d'encens
Arbre dont on tire la résine d'encens

Quatre jours pour arriver à la petite ville de Sur. Merci à l'ouvrier chinois qui m'a donné son chapeau de paille. Les repris de justice chinois employés à construire les routes à l'étranger ont du coeur. La pêche est l'activité principale de la paisible petite ville de Sur. Nous sommes invités au restau par l'équipe de l'émission télévisée allemande "Mare", le pendant de notre "Thalassa". Très tôt le matin, les "dhows" (gros bateaux en bois) rapportent leur pêche. Intense business sur la plage.

Un "dhow", bateau de pêche traditionnel
Un "dhow", bateau de pêche traditionnel

Retour des pêcheurs à Sur
Retour des pêcheurs à Sur

Deux jours plus tard, on continue 60 km, jusqu'à la pointe est de la péninsule arabique, Raz Al Jinz. Les tortues vertes, espèce protégée, aiment venir y pondre par milliers chaque année. La plage ressemble à un champ de mines. Elles y creusent de grands trous les uns à côté des autres. Savez vous qu'après leur ponte, elles retrouvent la mer grâce au scintillement de la lune sur l'eau. Alors ne les perturbez pas avec une lampe de poche ou autre source lumineuse, et ne vous mettez jamais face à elles. Elle ne viennent pondre que tous les 2 à 4 ans. Nous sommes seuls à bivouaquer à quelques pas derrière cette plage, seuls à observer à 5h du matin l'une de ces grosses bêtes de 200 kg qui creuse et qui pond, se fatigue et soupire fortement. Est-ce de l'eau ou des larmes qui coulent de ses grands yeux ? Quel plus beau cadeau aurais-je pu recevoir ? Ce jour qui est celui de mes 50 ans !

Le jour des 50 ans d'Eric, 5h du mat.
Le jour des 50 ans d'Eric, 5h du mat.

Tortue verte, espèce protégée
Tortue verte, espèce protégée

On continue plein sud pour atteindre Asaylah, puis Al Ashkharah et enfin Khuwaymah. Toujours de plus en plus dur par la chaleur et la piste. On se réfugie à l'ombre d'un engin goudronneux qui asphalte les routes. Chris a eu trop chaud, 2 heures sont nécessaires pour baisser un peu sa température en se mouillant constamment. La sieste n'est pas vraiment possible à cause de la chaleur. On attend patiemment les 16 heures pour une température acceptable.
Nous devons souvent pousser les vélos. Le sable fin nous stoppe net. Inutile d'utiliser les béquilles, les vélos restent debout, verticaux, plantés.

Des pistes difficiles
Des pistes difficiles

Plus de route, plus de piste ! face aux 60 km de "ramlat" (dunes de sable). Nous sommes bloqués. On monte la tente sur la plage et verrons la suite demain. Il y a un passage par la plage à marrée basse, sur sable mouillé. On essaye, on est toujours trop lourd, impossible ! Pas d'autre solution que de s'asseoir en bord de route et d'attendre un hypothétique véhicule qui nous emmènerait.

Dans l'attente, Christine s'organise ..
Dans l'attente, Christine s'organise ..

Nous n'avons attendu que 2h pour être embarqués par un pick- up. Il nous laissera 60 km plus loin et nous finirons par atteindre le village de Shannah en longeant 25 km de salines. Des travailleurs s'affairent à remplir et ficeler des sacs sous la chaleur de plomb.

Un omanais récolte le sel
Un omanais récolte le sel

Un ferry toutes les 2 heures à Shannah pour l'île de Masirah. Gratuit pour les passagers, et pour les vélos aussi. Un chameau est effrayé en voyant Christine ..

Une seule petite ville, un seul hôtel et rien d'autre. On fixe plusieurs bidons de 6 litres d'eau sur nos vélos et partons faire le tour de l'île en 3 jours, 200 km. Encore des pistes ardues avec sable ou cailloux, mais c'est presque plat. Une route est en construction avec ouvriers indiens pour la plupart, qui nous alimentent en eau de temps à autre. Un pêcheur nous donne un thon que l'on enveloppe dans un linge mouillé. Nous sommes pratiquement seuls, comme sur une autre planète.

De retour au "Masirah Hotel", la manager impressionnée par nos performances veut absolument nous rendre service. Eric profiteur devient photographe. Sheika est masquée selon la tradition, comme toutes les autres femmes de l'île, sa secrétaire aussi. Elles acceptent les photos.

Un face à face à Masirah
Un face à face à Masirah

Femme de Masirah
Femme de Masirah

Notre retour sur Muscat durant 3 jours par l'intérieur du pays s'est fait sous un soleil écrasant (eh oui, on se répète). Notre boucle avec retour à Muscat aura duré 19 jours pour 1 300 km. Nous aurions aimé descendre à Salalah, frontière yéménite, mais nous aurions dû rouler encore 800 km avec retour par cette même et unique route. Parcours désertique et fade, sans intérêt à cette époque de l'année. Nous sommes trop tard dans la saison.

Repos
Repos

A notre arrivée à Muscat, mon fils Allan nous fait la surprise de venir nous voir une douzaine de jours.. sans vélo ! Nous prenons une voiture, matériel de camping et partons lui montrer quelques belles places. Entre son sport matinal.. ..

.. .. l'étudiant parfait n'oublie ni ses exa de fin d'année ni son plaisir de manger ..

Allan, l'étudiant parfait
Allan, l'étudiant parfait

Allan invité chez Houmed
Allan invité chez Houmed

Djebel Shams
Djebel Shams, la plus haute montagne d'Oman (3 000m), nous coupe le souffle.

La gorge a 1 000 m de fond
La gorge a 1 000 m de fond

Allan négocie un cadeau pour sa soeur
Allan négocie un cadeau pour sa soeur

Scène villageoise sur le Djebel Shams
Scène villageoise sur le Djebel Shams

Pêche aux calamars
De retour sur la côte, Allan part une journée à la pêche aux calamars avec les locaux. La barque avance tout doucement, trois cordes tirent 3 snorkeleurs qui observent le fond et stoppent le bateau à la vue de calamars. Munis d'un crochet, ils descendent en apnée les attraper à une dizaine de mètres de fond. Cette pêche dure entre 6 et 8 h par jour ..
Un autre jour, Allan se fait mordre à la cuisse par le poisson lune avec lequel il joue, au moment même où il fait demi-tour, peur au ventre, en voyant sept beaux requins face à lui.

Morsure de poisson lune
Morsure de poisson lune

Allan et le requin marteau
Allan et le requin marteau

Canyoning dans la "Snake Gorge"
Allan finit son séjour avec une bande de copains qui nous emmènent faire du canyoning dans la "Snake Gorge". Un canyon de fou, d'au moins 5 km de long. Nous nous sommes battus toute la journée pour en sortir. Nous nous serions crus avec Indiana Jones, des sauts d'enfer dans l'eau fraîche, de la descente en varappe et de l'eau et de la grimpe etc. On a croisé des serpents dont une belle vipère. On s'est retrouvé dans des tunnels étroits à nager sans pied, sac sur le dos et à demi-coincés par des herbes ou troncs d'arbres flottants. C'était terriblement excitant. Tout ceci en surveillant le ciel, car la montée rapide des eaux est mortelle chaque année. Je n'ai pas pu prendre mon appareil photo dans cette histoire (eau, sauts, chocs ..) et la faible lumière du fond de la gorge n'a pas aidé les copains à prendre celles qu'ils nous ont données ..

On s'en sortira tous
On s'en sortira tous

Avec Reinhard, Ahmed et les autres
Avec Reinhard, Ahmed et les autres

Nous quittons mon fils avec regret mais à son âge, le devoir l'attend :-)

Afin de remercier Reinhard pour son hospitalité, je décide alors de l'aider en travaillant 2 semaines.
Il me donne à construire une petite maison pour faire de l'ombre aux deux ânes d'une école. J'accepte pour aider un peu ces pauvres bêtes qui sont tout de même de bien tristes symboles.

Mais où sont donc les ânes ?
Mais où sont donc les ânes ?

Dans cette même école privée, la propriétaire, Souad, nous invite à un festin à l'hôtel Intercontinental et nous propose de présenter un diaporama de notre voyage à vélo. J'interdis de rire tous ceux d'entre vous qui connaissent mon anglais parlé, ce diaporama fut un succès auprès des jeunes.

Eric adore être au centre !
Eric adore être au centre !

Nous sommes restés un peu longtemps à Oman, mais c'est un pays qu'il ne faut en aucun cas zapper, il est trop beau et les gens sont si agréables, certains presque naïfs dans leur gentillesse. Pour sûr, nous y retournerons un jour.
Que faire maintenant ? Nous ne voulons plus retourner en Iran et encore moins remonter l'Iran le long de l'Afghanistan (drogue et contrebande dangereuse), comme nous l'avions planifié au départ. Le sud Pakistan doit être traversé en bus ou accompagné par la police à cause de son insécurité. Nous décidons alors de faire le saut en avion pour arriver à New Delhi en Inde. A priori, cette idée nous cassa la baraque, nous qui avions décidé de nous déplacer qu'à vélo. Mais dans un deuxième temps, il faut se rendre à l'évidence, ce n'est pas toujours nous qui décidons, mais les états eux-mêmes. Cette situation me fit penser à Nicolas Bouvier qui disait : "On croit qu'on va faire un voyage mais c'est le voyage qui vous fait, ou vous défait !" (N. Bouvier : L'usage du monde).
Et puis, nous ne sommes pas les seuls à nous trouver parfois devant un mur. Une tortue venue pondre sur la plage se trouva face à la falaise et dû faire demi-tour sans poser ses oeufs ..

Empreintes de tortue venue pondre
Empreintes de tortue venue pondre

Aujourd'hui, 20 mai 2006, nous sommes à Delhi nord, quartier tibétain, et prendrons sous peu la route en direction du Ladakh où plusieurs cols de plus de 5 000 m d'alt. nous attendent.

PS : Nous remercions le ministère du tourisme d'Oman de nous avoir obtenu un billet aller simple pour les Indes (aller-retour obligatoire) et la gratuité pour le transport dans l'avion de nos 120 kg de bagage.